17/09/2018
"L'accompagnement, une voie de tendresse et de compassion". Le sous-titre de ce livre ne pourrait mieux le décrire. Il aide à démystifier la maladie, à comprendre le vécu de la personne atteinte, à saisir le défi des proches aidants. Ce livre écrit par Marie Gendron, la fondatrice du Baluchon Alzheimer, respire la compassion. Il est un incontournable non seulement pour les malades et leurs proches mais pour tous ceux qui les accompagnent.
Extrait:
Le cumul des pertes et des deuils génère inévitablement des émotions de toute nature, des humeurs contradictoires où se mêlent ou bien se succèdent colère et tendresse, dénégation et acceptation, détresse et espoir, sollicitude et incompréhension, culpabilité et rationalisation, regrets et doux souvenirs. Ces émotions sont tout à fait naturelles et légitimes. Leur absence serait anormale.
Selon une psychologue reconnue en ce domaine particulier (...) il faut entretenir l'espérance d'une vie sereine par divers moyens comme la méditation, le contact avec la nature, les contacts significatifs avec les autres.
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La prévision de multiples deuils peut s'accompagner du risque d'en faire plus que nécessaire, comme de se priver des bons moments de la vie, d'ignorer les réactualisations ou les bénéfices que la maladie procure soudain: tendresse retrouvée, mots d'humour, surnom affectueux réinventé, etc. Certains chercheurs se sont intéressés aux gains que pouvait parfois générer le fait d'accompagner une personne souffrant de la maladie d'Alzheimer: gains de l'ordre de la croissance personnelle, de l'acquisition d'une nouvelle force intérieure, d'un meilleur sens de la débrouillardise, d'une nouvelle spiritualité, d'un nouveau regard sur les priorités de la vie et enfin d'un nouvel altruisme.
Toutefois, je le dis haut et fort, il est un deuil qu'il faut à tout prix éviter et s'éviter: celui de refuser toute aide extérieure. Il ne faut pas s'isoler dans sa douleur, car le premier pas sur la voie de l'isolement risque de conduire à l'isolement extrême, à l'abandon irrémédiable. Chercher de l'aide, demander un soutien est toujours important, très souvent indispensable. Les recherches sont unanimes à ce sujet.
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Par ailleurs, et fort heureusement, la maladie d'Alzheimer peut aussi permettre l'émergence de capacités d'amour et de tendresse brimées depuis longtemps. (...) Devenues plus simples et plus directes dans leurs relations, elles (les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer) oublient toute crainte de choquer, ignorent tout désir de réussite, abandonnent tout artifice, tout jeu de personnage en mal de pouvoir. Elles sont enfin elles-mêmes.
Un autre aspect qui fascine (...) tient à leur extraordinaire capacité à saisir l'état émotif d'autrui, à mesurer l'authenticité des gens, à détecter la bienveillance comme la malveillance, à décrypter les signes de douceur ou de dureté dans le ton, les gestes ou les regards. (...) Les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer deviennent des scanners d'âme et des thermomètres de leur environnement humain. Elles savent reconnaître les individus qui se dissimulent sous des masques ou qui jouent des rôles. Elles saisissent des subtilités qui souvent nous échappent. Elles retrouvent la merveilleuse sensibilité des enfants. Elles deviennent nos propres reflets: notre douceur les rend douces, notre agressivité les rend agressives.